ACF est très reconnaissant à Pilar Bouguennec, professeur de yoga et maman de Vincent d’avoir organiser une séance de yoga sur la piste cet été.
L’athlétisme et le Yoga ont au moins un point commun, ces deux disciplines recouvrent une grande diversité de pratiques et, je rajouterais, de pratiques exigeantes si l’on a la volonté de progresser.
Au demeurant, comme Pilar l’aborde, les cinq piliers du yoga : la maîtrise du souffle, les postures, la relaxation, la méditation et la nutrition sont des préoccupations partagées.
Il est évident que le yoga offre des techniques intéressantes pour un coureur de fond, à commencer par la maîtrise de la respiration.
Cette capacité peut se révéler très utile pour faire baisser le niveau de stress avant une épreuve ou encore pour mieux récupérer après l’effort.
Le yoga est une approche bienveillante et complémentaire de la PPG en matière de posture et d’étirements. En même temps, elle permet le gainage plus profond que celui pratiqué par les coureurs.
Il est aussi, vous le verrez, bénéfique pour lutter contre le mal de dos, ou encore améliorer le système digestif et certaines articulations du corps « oubliées ». Les notions familières de relâchement sont également concernées par cette pratique.
Finalement, cette discipline permet au coureur d’acquérir une meilleure connaissance de son corps et de son mental. Considérons que c’est un partenaire très intéressant qui peut offrir de nouvelles pistes de travail.
Mais laissons-lui la parole !
Christian Rebollo
Pour faire suite à la séance de yoga de cet été avant les vacances voici quelques photos et des explications afin de poursuivre la réflexion sur les étirements.
« On pense souvent que Running et Yoga sont antinomiques. Yoga et Running se retrouvent avant tout sur un élément fondamental à la vie, le souffle. En Yoga, on travaille le souffle. La course en bénéficie donc forcement. Le travail postural, notamment de rectitude du dos et d’ouverture des épaules, permettra d’améliorer la posture de course, de gagner en légèreté, en puissance et optimisera le fonctionnement du diaphragme qui doit monter comme un piston. Ensuite, la souplesse, c’est comme la VMA, ça se travaille… Or pour un coureur, il est important d’avoir une bonne souplesse de la chaîne postérieure. Elle donne de l’allonge sur la foulée et réduit les risques de blessures » – Pascal Jover
Les étirements visent à allonger les muscles d’une articulation pour lui donner une plus grande amplitude de mouvement.
L’étirement augmente la flexibilité et l’énergie du corps circule mieux. Un muscle flexible est plus résistant aux blessures. L’étirement brûle des calories. L’étirement augmente l’endurance cardio respiratoire et combat les effets du vieillissement, il soulage du stress, il améliore la coordination musculaire, soulage les douleurs du bas du dos…
Les coureurs, mais surtout nous tous qui sommes très longtemps assis sur des chaises, avons des difficultés à étirer les jambes devant nous à cause de l’obstacle constitué par la résistance des muscles de la face postérieure des jambes. La longueur des muscles à l’arrière des jambes est souvent raccourcie par notre mode de vie. Les muscles agissent alors en état de raccourcissement alors que la station debout comme la course pour être harmonieuse, équilibrée et efficace réclament une bonne élasticité des muscles. C’est pourquoi les exercices d’étirement améliorent et contribuent à redonner aux muscles plus de longueur.
Étirement des muscles ischio-jambier dans la demi pince (Ardha Paschimottanasana)
Je viens placer le pied droit par-dessus la cuisse gauche, la tranche externe du pied touchant le sol,
Je sens très vite l’étirement assez intense derrière la jambe tendue et progressivement sur des expirations, je descends le dos droit.
En fonction de ma flexibilité, je place l’arrière du genou droit au-dessus du genou gauche, je ramène vers moi les orteils du pied gauche, je peux accrocher le gros orteil, redresser le dos et descendre à partir du sacrum en poussant le menton en avant. Je profite de chaque expiration pour avancer un peu plus. C’est grâce au souffle et à mon relâchement musculaire que je vais progresser.
On voit sur la première photo que le haut de mon dos est arrondi, ce n’est pas à faire, c’est mieux quand tout le dos est droit – comme dans la photo qui suit…
Posture d’Edwige
Le haut du dos est arrondi car elle veut atteindre les orteils. Les épaules arrondissent le haut du dos (elle n’est pas la seule) alors que l’on voudrait étirer à partir à bassin afin d’éloigner l’origine de l’ischio-jambier qui vient s’attacher sur l’ischion.
Autre possibilité d’étirement dans la posture très connue de Yoga, le chien tête en bas (Adho Mukha Svanasana). Posture qui nécessite un étirement préalable des mollets et des ischio-jambiers que j’ai voulu expliquer car si elle est mal prise, elle peut occasionner des problèmes de dos. Toute la difficulté de la posture est de bien placer le bassin afin de ne pas pincer les disques intervertébraux. A partir d’une position en quadrupédie, je viens m’asseoir sur les talons, les bras tendus devant moi pour étirer toute la colonne, le front au sol. Mes doigts écartés au sol vont rester immobiles. Je plie les chevilles, orteils au sol écartés puis je commence par lever le bassin en gardant les genoux légèrement fléchis, comme si je voulais amener le ventre sur les cuisses. Je recule le bassin et le lève vers le haut, les cuisses à la verticale dans un premier temps afin de bien placer le bassin en antéversion (comme si je voulais « verticaliser » les membres inférieurs).
La posture est atteinte quand les talons sont au sol, mais il faut pouvoir le faire quand les ischio-jambiers ont suffisamment de longueur sinon cela est impossible. Il est préférable de garder les talons élevés et le bas du dos bien placé, les talons au sol et un dos arrondi. Dans tous les cas, on doit protéger le positionnement physiologique des courbures vertébrales.
On peut utiliser des blocs support sous les mains (de préférence contre un mur pour ne pas glisser) qui soulagent partiellement du poids du tronc et facilitent le recul du bassin et la pose des talons sur le sol.
On peut aussi, comme sur cette photo, marcher sur place en pliant une jambe d’un côté afin d’étirer de l’autre l’ischio-jambier et approcher le talon du sol mais en gardant le bassin dans l’antéversion.
En tous les cas c’est une posture qui demande beaucoup de préparation et est assez exigeante pour les épaules.
Posture afin de comprendre comment éloigner l’origine et la terminaison d’un muscle à partir de la posture, la tête au genou (Janu Shirsasana).
Dans cette posture je commence par placer la plante du pied à l’intérieur de la cuisse. Je laisse descendre ici le genou droit vers le sol puis je vais, en étirant tout le dos, venir descendre sur la jambe tendue.
Une première flexion du genou va libérer l’origine du principal muscle du mollet, le gastrocnémien, cela permet à la terminaison sur l’os du talon de bouger librement. Une fois les muscles du mollet relâchés, je plie les coudes pour ramener le haut du pied vers moi et je le maintiens dans cette position. Je mobilise ainsi la terminaison des muscles du mollet à un point plus éloigné de son origine sur le fémur.
Une seconde flexion du genou va libérer la terminaison des ischio-jambiers sur la jambe sous le genou. Les psoas peuvent alors basculer le bassin en avant, ce qui me permet d’aller plus loin dans la flexion de mon buste vers l’avant. En fonction de ma flexibilité, je vais pouvoir étirer la jambe.
J’ai également proposé lors de cette séance une salutation au soleil, Surya Namaskar qui est la succession de 12 postures. C’est une excellente suite de mouvements pour échauffer tout le corps de la tête aux pieds. Elle se pratique plutôt le matin en coordonnant le mouvement à la respiration. Elle est excellente pour assouplir et étirer. Elle donne au corps tout entier une très grande énergie en favorisant la circulation sanguine. Elle assouplit la colonne vertébrale et renforce toute la musculature.
1 – En expirant, je place les mains l’une contre l’autre devant la poitrine. Je conserve la tête et le cou alignés.
2 – Je débute l’inspiration en étirant les bras de chaque côté des oreilles, paumes vers l’avant. J’étire tout l’avant du corps, puis je poursuis mon inspiration en plaçant du poids sur les talons, je regarde vers le haut.
3 – Je débute l’expiration en m’inclinant vers l’avant. Il est préférable dans cette posture de plier les genoux afin de protéger le bas du dos, jusqu’à poser les deux mains de chaque côté des pieds au sol.
4 – J’inspire en étirant le pied droit loin derrière pour venir dans une fente et ouvrir la poitrine.
5- En restant en suspension de souffle, je place la jambe gauche à côté de la jambe droite dans une planche. J’aligne la tête, le dos, les hanches et les jambes. J’engage mes abdominaux et mes fessiers.
6- J’entame l’expiration en posant les genoux au sol, j’abaisse la poitrine entre les mains et j’aligne les épaules avec l’extrémité des doigts. Je touche Le tapis avec le front en gardant le bassin surélevé.
7-Inspiration en poussant sur les mains comme une reptation afin de lever la tête dans un petit cobra.
8- Sur une expiration, je lève le bassin vers le ciel dans la posture du chien tête en bas que nous avons détaillé. Les bras sont écartés de la largeur des épaules, les pieds de la largeur du bassin.
9-Je transfère le poids du corps vers l’avant afin de revenir dans une fente en ramenant le pied droit entre les deux mains sur une inspiration comme dans la posture 4.
10- Sur une expiration, je ramène la jambe gauche à côté de la jambe droite, les genoux tendus, les mains se trouvent de chaque côté de orteils.
11- Sur une inspiration, je viens m’étirer vers le ciel comme dans la posture 2 du début.
12- Sur une expiration, je baisse les bras le long du corps. Je garde le dos droit et je prends une grande inspiration afin de faire la même série de postures mais en commençant avec la jambe gauche vers l’arrière.
La salutation au soleil est complète quand j’ai fait les 12 postures de chaque côté.
Conclusion
Je partage cette vision d’un ostéopathe : « Le mouvement trouve sa source dans la mise en flexion des articulations et le raccourcissement musculaire par l’intermédiaire de la contraction. Plus il est intense (exemple comme chez les sportifs, les coureurs), plus il entretient la pliure des joints et développe la puissance des muscles. En contrepartie les articulations perdent de leur souplesse par restriction de leur extension et l’augmentation de la puissance musculaire restreint la fluidité des gestes donc la qualité de la mobilité ».
La contraction des muscles sollicités lors de la course favorise la puissance du muscle mais limite la souplesse de l’articulation et entraîne un raccourcissement du muscle. La pratique du Hatha Yoga répond et s’adapte à cette réalité. Pour ma part, je travaille de plus en plus avec une approche qui respecte le corps, ses limites avec une vision anatomique et ostéopathique.
Pilar Bouguennec
Adepte et enseignante de Hatha Yoga